Faute de gestion : responsabilité, conséquences, conseils
Publié le 21 août
par Pierre Ecuvillon
Relu
4 min. de lecture
Publié par Pierre Ecuvillon
Relu par Amandine Dujardin
4 min
Une erreur de gestion peut arriver, mais elle n’est pas sans conséquences. Mauvaise décision financière, non-respect des obligations légales… Un·e dirigeant·e peut voir sa responsabilité engagée et mettre son entreprise en péril. Heureusement, ces situations peuvent être évitées. Voici les fautes de gestion les plus courantes et quelques conseils pour protéger votre activité.

Qu'est-ce qu'une faute de gestion ?
Définition légale et pratique
La faute de gestion n'est pas définie de manière explicite par la loi. Elle se caractérise par une action ou une omission d'un·e dirigeant·e, contraire aux intérêts de l'entreprise.
Cette notion est appréciée au cas par cas par les tribunaux, en fonction des circonstances spécifiques.
Critères pour qualifier une faute de gestion
Plusieurs éléments peuvent indiquer une faute de gestion :
Exemples de fautes de gestion
Type de faute | Exemples |
---|---|
Violation des obligations légales ou réglementaires | - Ne pas déposer les comptes annuels |
Négligence ou imprudence | - Gestion financière hasardeuse |
Actes contraires à l'intérêt de l'entreprise | - Utilisation des biens de la société à des fins personnelles |
💡
L'évaluation de la faute de gestion repose sur l'analyse des décisions et comportements du dirigeant et leur impact sur la santé financière et juridique de l'entreprise.
Études de cas jurisprudentiels de fautes de gestion
Plusieurs décisions judiciaires illustrent les conséquences des fautes de gestion commises par des dirigeant·es d'entreprise. Voici quelques exemples marquants.
Poursuite d’une activité déficitaire
Dans l'affaire "Société Breta" (Cass. com., 12 février 2013, n° 11-23.739), le dirigeant a continué à contracter des dettes alors que l'entreprise était en état de cessation des paiements. La Cour de cassation a confirmé que cette attitude constituait une faute de gestion, engageant sa responsabilité personnelle dans le cadre de l'insuffisance d'actifs.
Absence de tenue régulière de la comptabilité
Dans l'affaire "Roume" (Cass. com., 22 mars 2016, n° 14-21.555), le dirigeant n'a pas tenu une comptabilité régulière, ce qui a conduit à des décisions financières désastreuses. La Cour a rappelé que l'absence de comptabilité est un manquement grave aux obligations de gestion.
Utilisation des fonds de l'entreprise à des fins personnelles
Dans l'affaire "Société Numérika" (Cass. com., 10 janvier 2018, n° 16-18.825), le dirigeant a utilisé les fonds de l'entreprise pour des dépenses personnelles, notamment l'achat d'un véhicule de luxe et des voyages. La Cour a estimé qu'il s'agissait d'un abus de biens sociaux, constitutif d'une faute de gestion lourde.
Investissement sans étude préalable
Dans l'affaire "SA Jely" (Cass. com., 27 mars 2019, n° 17-15.320), le dirigeant a investi massivement dans un projet sans étude de marché préalable. Cela a entraîné la perte quasi totale des fonds propres. La Cour a jugé que ce manque de prudence constituait une faute de gestion, engageant sa responsabilité civile et financière.

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Conséquences pour le ou la dirigeant·e en cas de faute de gestion
Responsabilité civile
Lorsqu'un·e dirigeant·e commet une faute de gestion, sa responsabilité civile peut être engagée si cette faute cause un préjudice à la société, aux associé·es ou aux tiers.
Dans ce cas, le ou la dirigeant·e peut être condamné·e à réparer le dommage en versant des dommages et intérêts.
En cas de liquidation judiciaire, si la faute a contribué à l'insuffisance d'actifs, le ou la dirigeant·e peut être tenu·e de combler le passif sur ses fonds personnels.
Responsabilité pénale
Certaines fautes de gestion constituent des infractions pénales. Elles exposent le ou la dirigeant·e à des sanctions telles que des amendes ou des peines d'emprisonnement.
Parmi ces infractions figurent :
l'abus de biens sociaux ;
la fraude fiscale ;
le faux et usage de faux ;
le détournement de fonds.
⚖️
La responsabilité pénale des dirigeants peut être engagée même en l'absence de préjudice avéré. Le simple fait d'enfreindre la loi est suffisant.
Conséquences professionnelles
Au-delà des sanctions civiles et pénales, une faute de gestion peut avoir des répercussions sur la carrière du ou de la dirigeant·e.
Les tribunaux peuvent prononcer une interdiction de gérer. Le ou la dirigeant·e est alors empêché·e d'exercer toute fonction de direction au sein d'une entreprise pour une durée pouvant aller jusqu'à 15 ans.
🚨
Cette interdiction est inscrite au fichier national des interdits de gérer. Elle limite les perspectives professionnelles futures du ou de la dirigeant·e concerné·e.
Nos conseils pour éviter les fautes de gestion
Respect des obligations légales et réglementaires
L’élément le plus important est de vous assurer de respecter scrupuleusement les lois et règlements applicables à votre secteur d'activité. Le non-respect de ces obligations peut entraîner des sanctions et engager votre responsabilité en tant que dirigeant·e.
L’idéal est même de vous entourer de conseillers externes, tels que des avocat·es ou des expert·es-comptables, pour garantir la conformité de vos actions.
Gestion financière prudente
Il faut adopter une approche rigoureuse dans la gestion des finances de l'entreprise. Les décisions stratégiques doivent être documentées, notamment avant d'engager des fonds importants ou de signer des contrats significatifs.
Cette pratique permet de justifier vos choix et de démontrer votre diligence en cas de contestation.
Séparation des biens personnels et professionnels
Nous vous conseillons de distinguer clairement les ressources de l'entreprise et vos biens personnels. Toute confusion entre les deux peut être interprétée comme un abus de biens sociaux. Les actifs de l'entreprise doivent être utilisés uniquement à des fins professionnelles.
Pour cela, un compte pro dédié à votre activité s’avère indispensable pour scinder vos flux professionnels de vos flux personnels.

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Faute de gestion : le mémo
Vous avez désormais toutes les clés pour éviter les fautes de gestion et protéger votre responsabilité en tant que dirigeant·e :
la faute de gestion n’est pas définie par la loi mais reconnue par la jurisprudence ;
elle peut impliquer la mauvaise gestion financière ou le non-respect des obligations légales ;
elle peut avoir des conséquences civiles, pénales et professionnelles ;
la séparation des biens et la tenue rigoureuse des comptes diminuent les risques pour le ou la dirigeant·e.
Anticiper les risques et s’entourer de professionnels compétents reste la meilleure approche pour éviter les fautes de gestion.
Pour aller plus loin, vous pouvez découvrir notre guide complet sur la gestion de trésorerie en entreprise.
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